Une curiosité ! Dup de Book-en-stock m’a fortement conseillé de lire ce
roman policier. Son billet ne doit pas vous faire hésiter. Et ce roman donne fortement envie de se plonger dans l’œuvre de Richard Albisser.
Nous sommes à Roubaix et ses environs, en 2008, et les préparatifs de la Saint Valentin occupent le capitaine Drassir et son épouse Jasmina. Lui travaille donc pour la police et elle est devenue écrivain de polars. Après un premier roman plein de promesses, Jasmina cherche en vain la bonne idée pour démarrer le deuxième. Mais ses pensées vont ailleurs : son projet est d’accueillir la petite Marie, une jeune haïtienne qu’ils ont décidé d’adopter.
Jasmina reçoit la visite de André Mendus, qu’ils ont rencontré lors d’une précédente enquête. Celui-ci raconte à Jasmina comment des faits étranges ont fait irruption dans sa vie, des faits anodins liés au trois de carreaux, une carte d’un jeu de tarot. Ceci pourrait faire l’objet d’un roman, pourquoi pas ?
Bruno Valet, 27 ans, chef de rayons liquides chez Soulier et compagnie, se fait écraser dans l’allée L de l’entrepôt. La police classe rapidement l’affaire comme accident mais sa femme Valérie Valet n’y croit pas. Elle se rend au commissariat pour porter plainte, et la main courante est enregistrée par le commandant Steenman, qui va bientôt disparaître.
Alors qu’elle se baladait, Jasmina est prise à partie alors qu’elle va pour reprendre sa voiture. Elle se rend compte qu’elle est suivie puis pourchassée. Elle accélère alors l’allure mais ne fait pas attention aux feux rouges. Elle va percuter une voiture et se retrouver dans le coma. Le capitaine Drassir va devoir mener de front toutes ses enquêtes en ayant en tête que sa femme se bat contre la mort sur un lit d’hôpital. Cette enquête aux nombreuses ramifications va se dérouler bien éprouvante.
Décidément, le Nord regorge d’auteurs de talent, ou du moins les romans que je lis sur le Nord sont de bonnes pioches. Car celui-ci est un très bon roman passionnant à lire. Si on ne peut reprocher une chose à Richard Albisser, c’est bien l’art de mener une intrigue, en prenant plusieurs affaires et en les faisant converger petit à petit. C’est extrêmement plaisant à lire, car, en plus, c’est très bien écrit. Les personnages sont forts, beaux et vivants. Et puis, il y a la fin, une véritable pirouette, un pied de nez à tous les détectives en herbe que nous sommes. Richard Albisser m’aura envoyé une belle, superbe claque.
Au-delà de l’aspect policier du roman, le contexte social est très présent et bien introduit dans l’histoire, sans qu’on ait l’impression que cela soit rajouté pour faire beau. Les policiers sont tous des immigrés ou fils d’immigrés. Cela leur donne une certaine acuité dans leur vision de notre société. Et on a droit à des réflexions, liées aux personnages, qui sont suffisamment bien placées pour que cela fasse corps avec le personnage, sans que l’on ait l’impression que l’auteur nous assène ses vérités. C’est très bien fait et très plaisant, car cela rajoute plus de profondeur aux personnages. Et tout le monde en prend pour son grade, du système policier à la justice, des hôpitaux aux programmes télévisés, au milieu du racisme ambiant, ordinaire, celui qu'on ne remarque même plus. Et tout est écrit avec de l’humour cynique, ce qui aide à faire passer des messages.
Les deux petits bémols tiennent dans le choix de style de l’auteur et dans la police de caractère de l’éditeur. Richard Albisser a conçu son livre sans beaucoup de dialogues, mélangeant ceux-ci avec des impressions, décrivant par ci par là des situations par des phrases longues sans forcément nécessité. Ensuite, la police de lecture, est trop petite ; certes cela permet de faire un format de poche au prix extrêmement abordable (10€), mais comme je lis le soir, ça m’a gêné.
Ces deux petits défauts ne m’empêcheront pas de lire le prochain, ça c’est sûr. Pour finir, un grand merci à Dup pour son conseil, et aux éditions du Riffle noir pour cette découverte.