Ce blog a pour unique but de faire partager mes critiques de livres qui sont essentiellement des polars et romans noirs. Pour me contacter : pierre.faverolle@gmail.com
Après avoir lu La voix secrète, un roman bien passionnant et rempli de charme, j’étais curieux de lire ce Maison fondée, paru en même temps aux éditions Fantascope. Ces deux romans
très différents sont en fait très liés.
Luc Letellier est un jeune homme d’une trentaine d’années, qui travaille chez un marchand de bonbons. C’est un travail bien peu passionnant qui lui permet d’avoir un revenu fixe. Sa vraie passion, c’est d’écrire des romans, ou plus précisément des polars. Cela fait huit ans qu’il écrit, il a six romans en stock, et aucun n’a jamais été accepté par une maison d’édition.
Luc vit avec Anaïs, scénariste pour le cinéma. Elle doit d’ailleurs s’absenter pendant une longue période pour rejoindre l’équipe de tournage de Gilles à Nice. C’est à ce moment là qu’une maison d’édition qui s’appelle Rhésus, accepte son manuscrit Trak. Luc se rend au rendez vous et va tomber dans un traquenard.
Le marché est qu'on lui propose celui-ci : s’il réécrit un roman qui s’appelle La voix secrète sur un ordinateur qu’on lui fournit, l’antidote lui sera injecté en intraveineuse via l’ordinateur. S’il n’accepte pas, il mourra avant une semaine. S’il appelle la police, ils se vengeront sur Anaïs. Voici donc Luc lié à la vie, à la mort avec sa passion de l’écriture.
Ce roman va nous plonger dans l’éternelle relation entre un auteur et son œuvre. Michael Mention a choisi une forme qui alterne entre fantastique et roman noir, qui au premier abord, peut paraître surprenante. Passé ce postulat, la vision d’un auteur au travail et la démarche employée m’a parue très personnelle et en même temps passionnante.
A l’instar d’un Burroughs dans son Festin Nu, ou d’un Djian première période, on y voit un auteur enchaîné à son roman, avec une progression dans le lien qui passe de passion - amour à dégoût – haine. La descente aux enfers est progressive et inéluctable, avec un personnage attachant, comme le serait un prisonnier innocent. Le ton est à mon avis volontairement noir même si certains personnages sont extrêmes dans leur description et donc doucereusement ironiques. Il n’y a qu’à voir la remarque sur le classement des caractères par leur prénom fait par le narrateur, disant que les Michael sont rarement virils, ou les portraits jusqu’auboutiste de l’éditeur.
Au travers des extraits du livre réécrit, on y voit l’obsession de Luc de trouver le bon mot, la bonne phrase pour faire passer au lecteur la bonne ambiance, les bons sentiments ou la bonne description. On y voit aussi l’écrivain au travail, qui construit son livre jusqu’à ce que le livre devienne la vie de l’écrivain. En fait, avoir lu La voix Secrète avant m’a un peu plombé ma lecture car même si les extraits sont en grande partie différents, la trame est la même et la volonté de l’auteur de montrer l’importance d’un mot à la place d’un autre trop voyante et insistante.
La voix secrète et Maison fondée en 1959 ont été publiés simultanément. Si vous voulez pénétrer dans l’univers fantasmagorique et imaginatif de Michael Mention, je vous conseillerai plutôt de commencer par cette Maison fondée en 1959, même si je trouve que La voix secrète est un roman plus passionnant, réussi et facile d’accès. En tous cas, n’hésitez pas à me faire part de vos opinions.